jeudi 22 février 2018

Elle est revenue...


Elle est revenue d’entre les morts. Nous pouvons la voir, l’entendre, la toucher. Notre vie de famille reprend dans la maison de pierre qu’a bâtie mon père. Maman est là, avec nous, nous pouvons l’embrasser, la serrer dans nos bras. Elle est là, pâle comme une statue, malade comme de toute éternité, mais présente, vivante, auprès de nous.

Elle est revenue d’entre les morts. Et pourtant… petit à petit, je suis la seule à en avoir conscience. Notre vie de famille part en déliquescence, mon père et mon frère ne perçoivent plus sa présence. Mais moi je peux la voir, je peux l’entendre, je peux la toucher. Je sais qu’elle est revenue.

Pour le prouver à tous, pour lui permettre de rester, car elle partira de nouveau pas si on ne croit pas à son retour, il me faut des anneaux, des anneaux de pouvoir, brillants comme des soleils, grands comme des bracelets. Je dois partir à leur recherche, les trouver et les rapporter le plus vite possible.

Mais mon ventre m’embarrasse, un ventre de femme enceinte qui entrave mes mouvements, me rend lourde et lente dans ma quête. Je tente de me délasser pour mieux reprendre mes recherches par la suite. Je nage, dans notre maison de pierre. Il y a de l’eau à même le sol mais suffisamment profonde pour barboter. Les meubles flottent, statiques, dans le salon, et je nage au-dessus du carrelage noir. Mais je rencontre bientôt des obstacles : bout de bois provenant de la cheminée, amas de poussière s’agglutinant, tout ce que la maison renferme de sale et de misérable vient troubler mon ballet aquatique.

Je me fais une réflexion…

-    -     Je devrais appeler L**** [nom d’une amie chère] pour qu’on aille à la rivière…

Mais je réalise :

-    -    Mais non, nous ne sommes pas en juillet, nous ne pourrons pas nous baigner. Nous sommes en février.

Car dans ce monde maudit le temps s’est arrêté en février. Le soleil luit fort mais il fait froid, la nature s’est éveillée mais elle semble morte. Le temps ne s’écoule plus réellement. Nous sommes prisonniers de ce mois fatal.

Ou bien n’est-ce que moi ? Le monde tourne toujours, les astres n’ont pas arrêté leur course. Les gens poursuivent leur petite vie pendant que je demeure, seule, dans une case du calendrier.

On m’amène voir un psychologue. Je lui explique :

-     -   Elle est revenue d’entre les morts, je peux la voir, je peux l’entendre, je peux la toucher. Je ne suis pas folle.

Il me regarde d’un air contrit. On dirait qu’il a envie de me croire mais je lis le doute sur son visage.

Je continue :

-    -    Elle est revenue d’entre les morts, mais je suis la seule à le savoir. Pourtant, elle est bien là. Je peux la voir, l’entendre, la toucher. Elle est vraiment là.

Je fonds en larmes, la séance ne mène nulle part. Le psychologue, qu’il adhère ou pas à mes propos, ne peut rien pour moi. Je me souviens alors des anneaux de pouvoir et repart à leur recherche.

Je les trouve, le songe ne me dit pas comment, mais je les ai en ma possession et je rejoins ma mère. Elle se trouve dans une gare désaffectée. Une gare au style ancien, des locomotives à charbon gisent çà et là. Un plafond voûté, formé d’une multitude de carreaux de verre, filtre la lumière du jour.

Mon petit chien est sur les genoux de maman, assise par terre. Elle le caresse en lui parlant doucement.

Je me plante devant elle, raide comme un piquet.

-    -      Tu es revenue d’entre les morts, je le sais. Je peux te voir, je peux t’entendre, je peux te toucher. Tu es vraiment là.

Maman arbore alors une moue aussi dubitative que désolée et se couche sur le dos, les mains croisées derrière sa tête, les yeux fixés sur le dôme luminescent.   
Je lui tends alors les anneaux.

Elle les refuse d’une voix triste mais ferme :

-      -   Garde-les, tu vas en avoir besoin pour le bébé.

Je me laisse choir sur le sol froid, à genoux, et la contemple, perdue, hébétée, plus sombre et abattue que jamais. Le reste fut silence.





Deux ans aujourd’hui, tu hantes toujours mes rêves.

lundi 19 février 2018

Haute voltige intellectuelle...

Pour fêter les vacances, trois petites sentences diablement réfléchies...





















Petite variante :




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